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lundi 20 février 2017

Les RASED sont-ils efficaces ?

Quels effets du passage en Rased sur le parcours scolaire des élèves ?

Claire Bonnard, Jean-François Giret et Céline Sauvageot
Les Documents de Travail de l’IREDU
02.2017 



Disons-le d’emblée, cette étude de l'IREDU pointe l’inefficacité des RASED.

Rappelons que, pour remplacer les GAPP (Groupe d’Aide Psycho-Pédagogique), les RASED (Réseau d’Aides Spécialisées aux Élèves en Difficulté) furent créés en 1990. Leur mission était d’« apporter des aides spécifiques et différenciées aux élèves signalés en difficulté des écoles maternelles et primaires, qui doivent être complémentaires et ne pas se substituer à l’action de l’enseignant dans sa classe ». Ils sont constitués, dans le meilleur des cas, par deux professeurs des écoles spécialisés (maîtres E et G) et un psychologue scolaire pour renforcer les équipes pédagogiques dans la prise en charge des difficultés d’apprentissage et de comportement des élèves signalés comme étant en difficulté.

Suite à la loi Montchamp de février 2005 sur l’inclusion scolaire à tout prix des élèves dits “à besoins spécifiques”, l’utilité des RASED est paradoxalement devenue contestable puisque chaque instituteur en classe ordinaire devenait subitement apte à recevoir un ou plusieurs élèves souffrant de handicap. En 2007, la suppression des RASED fut même un temps envisagée.

Les auteurs de cette étude de l’IREDU ont jugé utile d’apprécier l’efficacité de ce dispositif (ce qui avait rarement été fait jusqu’alors) en s’appuyant sur un panel de 10 000 élèves entrés au CP en 1997 et suivis jusqu’en 5e.

Cela leur a permis de mettre en exergue trois points négatifs :
- un recrutement trop large : un tiers des élèves pris en charge ne présentent pas de difficulté scolaire ;
- un effet d’étiquetage : les élèves pris en charge par le RASED restent stigmatisés par ce passage ;
- l’effet des prises en charge sur le niveau scolaire est nul ou négatif : « Le fait d’avoir été en RASED a un impact d’autant plus négatif si l’élève présente initialement moins de difficultés scolaires et comportementales. En revanche, l’effet apparaît neutre pour les élèves jugés les plus en difficulté ».

Sur ce dernier point, j’ai pu personnellement constater, au long de ma carrière, que les prises en charge ne servaient pratiquement à rien, et n’entraînaient aucune amélioration du niveau scolaire ou du comportement des élèves confiés au RASED. Probablement parce que ces prises en charge étaient trop en pointillés, qu’elles débutaient trop tard dans l’année scolaire et se finissaient trop tôt, qu’elles enlevaient les élèves de leurs classes pendant que les autres élèves continuaient les apprentissages, et qu’elles s’inspiraient de principes pédagogiques situés exactement à l’inverse de ce qu’il faut mettre en œuvre pour ces élèves en perdition. Le jeu et l’auto-construction des savoirs ne font qu’empirer les situations de difficulté. Mais les collègues du RASED étaient charmants et sympathiques, ils prenaient toujours bien soin de ne pas trouver à redire sur les pratiques pédagogiques des maîtres des élèves qu’ils prenaient. D’où le retour de politesse à leur égard sur la qualité de leurs interventions. Et tant pis pour l’efficacité et les résultats obtenus…

Les conclusions de cette étude de l’IREDU rejoignent ce qu’écrivaient Sandrine Garcia et Anne-Claudine Oller dans Réapprendre à lire (p 183) : « Sans qu’il soit possible de détailler les recherches (au demeurant peu nombreuses) qui portent sur les effets des GAPP et plus tard des RASED sur les parcours des élèves, on peut observer qu’elles s’accordent généralement sur leurs conséquences négatives ». Ces auteurs relatent même, en note de bas de page (p 178), que des enseignants de terrain leur ont expliqué que « les RASED, ça fait vingt ans qu’ils ne foutent rien ». Remarque que j’ai également maintes fois entendue sous les préaux d’école, bien que beaucoup de collègues appréciaient de se délester d’un élève “à problème” le temps d’une prise en charge chichement octroyée.

Alors qu’en déduire ?

Avec l’inclusion généralisée des élèves à besoins spécifiques dans les classes ordinaires, les difficultés d’exercice du métier d’enseignant se sont indéniablement accrues. Et, parallèlement, la prise en charge des élèves en difficulté ne s’est pas améliorée, bien au contraire. Pour une intervention sérieuse, il aurait fallu alléger les effectifs des classes comportant une ou plusieurs inclusions, en comptant double ou triple les élèves qui ont un handicap scolaire ou de comportement caractérisé (sans parler d’une prime de sujétion spéciale pour l’enseignant, proportionnelle au degré de handicap des élèves qu’il accueille dans sa classe). Par ailleurs, la présence d’un orthopédagogue dans chaque école (ou pour un nombre donné de classes) permettrait des interventions plus fréquentes et plus efficaces car cet enseignant spécialisé, en étant constamment sur place, connaîtrait mieux les élèves et leurs difficultés. Mais ces améliorations auraient coûté cher, alors que l’adoption de l’inclusion forcée était justement une manœuvre pour réaliser des économies.

Reste qu’évaluer l’efficacité d’un dispositif pédagogique relève d'une sorte de tabou dans le système scolaire français complètement soumis à l’idéologie constructiviste. Comme le montre le peu d’études réalisées (et le tollé qu’elles suscitent à chaque fois) sur l’efficacité des RASED, qu'il est parfaitement légitime de questionner après 27 années de mise en œuvre !

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