Translate

samedi 8 mai 2010

Livre : La débâcle de l'école (prés. par Laurent Lafforgue et Liliane Lurçat)



Déprimant…

Ce livre est une longue déploration sur le niveau des élèves. Avec, comme fil conducteur, le fameux « c’était mieux avant » : les manuels, les programmes, les maîtres, etc.

Les divers contributeurs dressent un tableau catastrophique de l’état de l’École. Tableau qui n’est pas faux, même pas exagéré. Mais cette collection de constats se contente de rester déprimante. Aucune solution en vue. Que des regrets, de la nostalgie et des sanglots.

Le titre est d’ailleurs suffisamment évocateur. Le mot « débâcle » renvoie à l’effondrement lamentable de l’armée française, considérée jusqu’alors comme la meilleure du monde. Les soldats de 1940 auraient été trahis par leurs officiers comme les instituteurs d’aujourd’hui le sont par leur hiérarchie. “Débâcle” nous change un peu des “autopsies” et autre “faillite”. Dès maintenant, je propose à tous les auteurs de ce genre de littérature de lamentation de choisir d’autres mots pour leurs titres comme désastre, calamité, déroute, défaite, drame, tragédie, krach, etc.

À lire ces livres, on comprend que les partisans de l’enseignement traditionnel se complaisent dans l’amertume, qu’ils ressassent toujours les mêmes arguments (contre les langues vivantes, contre les ordinateurs, Internet et les calculatrices, bref contre tout ce qui est nouveau). Leur manque d’optimisme les rend aigris et agressifs. Celui qui ne rejoint pas leur cercle de pleureuses devient plus qu’un adversaire, il est considéré comme un “ennemi”. Véridique !

La seule solution qui revient comme un serpent de mer à travers tous ces livres, c’est l'expérimentation (une de plus !) menée par le GRIP-SLECC dans une dizaine de classes seulement et basée sur la pédagogie intuitive du regretté Ferdinand Buisson et sur une resucée des programmes de 1923 (vous avez bien lu !). On attend d'ailleurs avec curiosité les résultats officiels de cette résurrection pédagogique (en-dehors des auto-congratulations des "expérimentateurs", naturellement très satisfaits d'eux-mêmes).

Laurent Lafforgue – comme les autres – ne manque pas d’évoquer cette expérimentation (p 188). C’est la marque infaillible du traditionalisme. J’ajoute « en pédagogie ». Car la foi catholique du savant n'est un mystère pour personne.

Cela n’empêche pas Lafforgue de parler à nombreuses reprises de « l’enseignement explicite » et d’en vanter les vertus. Pour lui, l’expression “enseignement explicite” doit être comprise comme “enseignement traditionnel”. Curieusement, les partisans de ce type d’enseignement ne disent jamais “enseignement traditionnel” pour décrire leur façon de travailler. Ils préfèrent dire “enseignement explicite”, sans doute pour faire moderne. Mais, malheureusement pour eux, l’enseignement explicite correspond déjà à une pratique de classe précisément décrite étape par étape. Et cette pratique n’est pas la leur. Quand on joue de la guitare, on ne joue pas du violon. Et réciproquement.

Mais revenons au livre. Il est fait de contributions diverses et diversement intéressantes. Le seul à tirer son épingle du jeu, c’est Marc Le Bris. Son chapitre sur les origines de l’échec scolaire au Primaire est très bien écrit, argumenté et illustré, bien que le titre soit trop ambitieux pour le contenu. Le Bris enfourche son cheval de bataille des méthodes d’apprentissage de la lecture et démontre avec talent la nocivité des méthodes à départ global. Il parle aussi de manière convaincante des mathématiques et de la grammaire. Une autre institutrice, Marie Teissedre, témoigne de sa “formation” à l’IUFM. Mais ce qu’elle raconte a déjà et souvent été écrit ailleurs et depuis longtemps. C’est une redite.

J’ai vu avec surprise que le site appy.ecole était référencé dans la bibliographie. Cela ne suffira pas pour que je conseille la lecture de ce livre qui n’apporte aucun élément nouveau. Surtout pour ce qui est des solutions aux catastrophes qu’il contemple...

_________________________
La débâcle de l'école – Une tragédie incomprise
Présenté par Laurent LAFFORGUE et Liliane LURÇAT
François-Xavier de Guibert, Paris, 09/2007, 248 p.